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rose de la combinaison sous le jaune de l’organdi sera d’un tel effet, que je ne serais pas étonnée, oh ! mais pas étonnée du tout, si Petitdemange, aujourd’hui, se déclarait. Cher Alfred, artiste comme nous le connaissons, il ne saurait demeurer insensible au charme d’une jolie teinte chaude, ardente sans provocation. Tu étais en maillot de bain, le jour que tu fis la connaissance de ton premier mari. À vingt ans, tu avais les hanches étroites. Aujourd’hui, ce n’est pas que je veuille dire que tu sois une vieille femme, mais tu as passé la trentaine et, d’une enfant nerveuse et maigre te voilà devenue jeune femme belle et calme. D’ici peu tu seras imposante. Or, un magistrat de grand avenir ne peut s’éprendre d’une freluquette. Petitdemange, notre cher Alfred, j’en mettrais ma main au feu, choisira une compagne majestueuse. Déjà, il me semble te voir en grand décolleté, avec tous nos diamants, toutes nos dentelles, épouse respectée et même un tantinet enviée. Alors, ma chérie, alors, comme nous serons vengés de Cynthia. Mais il n’y a pas une minute à perdre. Donc, je résume : tu mets ta robe d’organdi jaune, une combinaison rose par-dessous et te voilà dorée comme le marbre de la Grèce, le soleil de midi, la barbe de Petitdemange…