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des cris de douleur aussitôt après qu’ils sont nés, et tous leurs traits revêtent alors l’aspect qu’ils doivent offrir par la suite. Ces seuls faits suffisent pour montrer qu’un grand nombre de nos expressions les plus importantes n’ont pas eu besoin d’être apprises ; il est toutefois digne de remarque que certaines d’entre elles, bien qu’assurément innées, réclament de chaque individu un long exercice avant d’en être arrivées à toute leur perfection ; il en est ainsi par exemple des pleurs et du rire. L’hérédité de la plupart de nos actes expressifs explique comment les aveugles-nés, d’après les renseignements que je tiens du R. R.-H. Blaise, peuvent les accomplir tout aussi bien que les personnes douées de la vue. Cette hérédité explique aussi comment jeunes et vieux, chez les races les plus diverses, aussi bien chez l’homme que chez les animaux, expriment les mêmes états de l’esprit par des mouvements identiques…

Nous allons maintenant nous demander jusqu’à quel point la volonté et la conscience ont pris part au développement des divers mouvements de l’expression. Autant que nous pouvons en juger, il n’y a qu’un très petit nombre de mouvements expressifs, tels que ceux dont nous venons de parler en dernier lieu, qui aient été appris individuellement, c’est-à-dire qui aient été accomplis d’une manière consciente et volontaire pendant les premières années de la vie, dans un but déterminé ou par l’imitation de nos semblables et qui soient ensuite devenus habituels. L’immense majorité des mouvements expressifs et les plus importants sont, comme nous l’avons dit, innés ou héréditaires ; on ne peut donc pas dire qu’ils sont sous la dépendance de la volonté de chaque