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DARWIN

plusieurs années, j’ai constaté que je gagnais du temps à griffonner des pages entières, aussi vite que possible, abrégeant les mots de moitié, et à les corriger ensuite à loisir. Les phrases ainsi griffonnées sont souvent meilleures que celles que j’aurais pu écrire avec réflexion.

Ayant ainsi fait part de ma manière d’écrire, j’ajouterai que, pour mes grands ouvrages, je consacre beaucoup de temps à l’arrangement général de la matière. Je fais d’abord l’ébauche la plus grossière en deux ou trois pages, puis une plus grande en plusieurs pages, quelques mots ou un seul remplaçant une discussion entière ou une série de faits. Chacune de ces divisions est encore augmentée ou transposée avant que je ne commence à écrire in extenso. Comme dans plusieurs de mes livres des faits observés par d’autres que moi-même sont cités au long, et comme j’ai toujours travaillé sur plusieurs sujets à la fois, je dois mentionner que j’ai organisé de trente à quarante portefeuilles, dans des meubles étiquetés, dans lesquels j’introduis au moment même une référence détachée ou une note. J’ai acheté un grand nombre de livres ; à la fin de chacun j’ai ajouté une table de tous les faits qui concernent mon ouvrage, ou, si le livre ne m’appartient pas, j’écris un résumé à part. J’ai un tiroir rempli de ces résumés. Avant d’entreprendre un travail quelconque, je regarde toutes les tables et j’en fais une autre générale et classée, et, en prenant les portefeuilles qui se rapportent le mieux au sujet que je dois traiter, j’ai toutes les informations réunies pendant le cours de ma vie prêtes à être utilisées ?

J’ai dit que mon esprit, à un certain point de vue,