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des milieux chauds et secs. Supposons que les premiers soient obligés de chercher leur subsistance dans l’eau en faisant fonctionner leurs membres d’une certaine façon, tandis que les autres doivent monter aux arbres pour cueillir des fruits, ce qui entraîne des mouvements bien différents. Comment, dans cette hypothèse ne sortirait-il pas à la longue de l’espèce initiale, deux groupes d’individus qui différeront d’elle et qui différeront les uns des autres ? N’auront-ils pas hérité, en effet, des particularités acquises que leurs ancêtres auront dues, et à l’action des milieux dissemblables qui les a modifiées, et aux mouvements qu’ils ont dû faire et répéter pendant des générations pour assurer leur nourriture, leur défense, leur reproduction, la protection et l’éducation de leur descendance ?

Après la Philosophie zoologique de Lamarck, un évolutionnisme d’aspect scientifique était donc esquissé. Mais cet évolutionnisme là n’a pas eu d’influence sérieuse sur la formation des idées de Darwin. Il écrira à Asa Gray : « Vous me parlez de l’œuvre de Lamarck. Je n’ai trouvé chez lui ni un fait ni une idée. » Darwin était trop sincère pour que nous puissions douter de sa parole. Aussi bien, vers la fin de sa vie a-t-il eu des regrets d’un jugement si sévère.