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suis à moitié décidé à vendre tout cela en bloc moi-même, pour avoir le plaisir de recommencer et de faire attendre mon argent à quelqu’un pendant dix ans encore. Je pourrais durer dix ans de plus si je trouvais quelque chose de nouveau à collectionner. »

Le vieillard cessa de parler et lança un regard de côté à George avec un fin sourire, très différent de l'expression qu’il prenait quand il voulait être agréable. Puis il reprit sa manière habituelle de parler, lançant de courtes phrases et omettant généralement le sujet ou le verbe, quand il ne les supprimait pas tous les deux. Il se peut qu’il n’eût débité sa harangue que dans le but de prouver à George qu’il pouvait parler aussi bien qu’un autre quand il le voulait.

« Vous plaît, mon petit discours ? Hein ? demanda-t-il.

— Je ne l’oublierai pas, répondit George. Il a au moins le mérite de l’originalité. »

George ne se souciait pas de prolonger sa visite au delà des limites de la stricte politesse, bien que la conversation de son parent l’eût assez amusé. Il fit quelques questions sur les livres, et s’aperçut que Tom Craik n’était nullement l’illettré coureur d’éditions qu’il avait supposé. S’il n’avait pas lu les trois mille volumes de choix qu’il possédait, il avait du moins une idée très nette du contenu de la plupart.

« Acheter un auteur et ne pas le lire, dit-il, c’est acheter un diamant dans un écrin et ne pas ouvrir l’écrin après. Hein ?

— Tout à fait, » répondit George en riant un peu.

Puis il prit congé. Le vieillard l’accompagna jusqu’à la porte de la pièce dans laquelle il l’avait d’abord reçu.