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avait été si heureuse. Pendant les dernières heures de la journée qui précéda leur retour à la ville, George ne la quitta pas, tandis qu’elle errait dans les allées du jardin et sous les beaux arbres, rentrait à la maison, parcourait toutes les pièces, puis se reposait encore sous la véranda, les yeux fixés au loin sur la rivière.

« J’ai été bien heureuse ici ! dit-elle pour la centième fois.

— Tu seras heureuse partout ailleurs, si cela dépend de moi, répondit George.

— Le serons-nous ? le serai-je ? demanda-t-elle en le regardant bien en face. Qui peut le dire ? On n’est jamais aussi sûr de l’avenir qu’on l’est du passé… et du présent. Emporterons-nous tout cela dans notre petite maison de New-York ? Comme ce sera drôle de vivre toute seule avec toi dans une petite maison où je ferai toute la besogne.

— Si tu veux me permettre de cirer les souliers, je serai très heureux, dit George. Je sais.

— Y penses-tu ! Toi, cirer les souliers ! s’écria Mamie avec indignation.

— Pourquoi pas ? Mais, sérieusement, nous pouvons faire beaucoup plus que tu ne te l’imagines… sans avoir de chevaux, bien entendu.

— Je crois que nous aurons tout de même des chevaux, dit Mamie en riant. Maman va garder une voiture pour moi et me laisse mon bon vieux cheval de selle. Entre nous, je ne crois pas que papa et maman comptent beaucoup sur notre économie. »

Elle était très heureuse et ne voulait pas assombrir l’avenir par l’idée d’être privée d’une partie du luxe auquel elle avait toujours été habituée. Au fond du cœur elle savait bien qu’elle était case-