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tu ce que je ferais ? J’agirais vis-à-vis de toi comme Constance Fearing a agi vis-à-vis de moi, seulement ce serait pire, parce que moi je suis un homme et que je n’ai pas le droit qu’ont les femmes de faire de semblables choses.

— C’est bien différent, dit la jeune fille en fixant les yeux sur l’eau.

— Non, ce n’est pas différent, insista George. Je n’ai pas le droit d’agir comme si je t’aimais, ni de te laisser croire seulement, d’après ce que je fais ou ce que je dis, que la chose est possible. Je suis brutal. Je le sais. Pardonne-moi, ma chère Mamie. Il vaut beaucoup mieux que la situation soit très nette. Nous nous connaissons depuis si longtemps et si bien que…

— Rien de ce que tu pourras dire ne me fera approuver ton départ.

— Soit ! néanmoins, si je ne pars pas comme l’exige mon devoir, je ne me le pardonnerai jamais…

— Je te pardonnerai.

— J’aurai horreur de moi-même…

— Je t’aimerai.

— Je me sentirai l’être le plus misérable de la terre.

— Je serai heureuse. »


XVII


George avait ramé jusqu’à une petite baie à l’abri du courant. La tentation de rester là, appuyé sur les avirons, le retenait avec une grande force. Qu’il le voulût ou non, l’expression qu’il avait remarquée deux fois sur le visage de Mamie pendant cet après-midi, le hantait et le fascinait.