Page:Crawford - Insaisissable amour, av1909.djvu/158

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

changer d’air. Totty ne pouvait chercher à faire croire que le seul désir de réaliser des économies la poussait à rester, et Tom Craik lui-même, dont la santé lui fournissait ordinairement des prétextes pour faire ce qu’elle voulait, était allé s’installer à New-port.

Depuis quelque temps elle paraissait avoir cessé de prendre intérêt à ses faits et gestes et se contentait, d’exprimer pieusement la croyance que le ciel pouvait seul intervenir avec succès quand on prenait de si téméraires libertés avec sa santé. M.  Craik vivait cependant d’après le livre d’arithmétique comme Tybalt combattait ; — sa nourriture était pesée, ses heures de sommeil et ses demi-heures de repos étaient comptées et réglées par d’infatigables serviteurs, l’épaisseur de ses vêtements était prescrite à chaque saison par une grande autorité médicale, ses sorties et ses rentrées étaient consignées sur un registre pour être soumises à l’examen de cette même autorité ; les carrossiers inventaient des véhicules pour son usage, les tapissiers imaginaient des systèmes de ressorts et de coussins pour son repos, et il ne voyageait que dans un wagon particulier. Il eût été difficile de voir en quoi Totty pouvait lui être utile, puisqu’il ne se souciait pas de sa conversation et qu’il pouvait acheter de meilleurs soins que ceux qu’elle pouvait lui donner.

Si George avait soupçonné que Totty était responsable des bruits répandus sur lui et sur Constance, il n’eût jamais remis les pieds dans la maison de sa cousine, en dépit de sa vieille amitié avec Sherrington Trimm. Mais l’habileté et le tact de Totty n’avaient pas été en défaut. Elle se rendait compte qu’elle avait subi un échec et qu’elle s’était trompée, au moins une fois dans sa