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PIÈCES JUSTIFICATIVES.

Une grande victime du despotisme, à ses concitoyens[1].


Chers concitoyens,

Personne de vous n’ignore les malheurs et les longues détentions d’Alexandre de Crequy-Montmorency, qui vous adresse ce peu de mots, pour vous les rappeler et vous intéresser à son infortune.

Ma vie qui va bientôt paroître, et que je dédie aux représentans d’un peuple libre et à tous les bons citoyens, dévoilera, d’une manière inconnue jusqu’alors, les iniquités et les horreurs qui ont été commises sons les règnes de Louis XV et de Louis XVI, par mes persécuteurs, qui m’ont tenu renfermé et trainé de prisons, en prisons, depuis ma plus tendre jeunesse jusqu’à l’âge de 55 ans, en France, en Espagne, en Portugal, en Empire et en Prusse, et ont fini par me faire détenir, pendant neuf ans, accablé de chaînes du poids de 60 livres, dans un souterrain, sous des noms empruntés, pour me soustraire aux yeux du peuple et me faire périr ignominieusement ; le tout pour favoriser les injustes prétentions des usurpateurs de mes biens, qui se les étoient partagés, après avoir prouvé (par un faux extrait mortuaire) au parlement et au public que j’étois mort, et qu’ils étoient mes héritiers, et après mille autres horreurs que je dévoilerai au long dans le courant de mon histoire, et dont j’ai été heureusement délivré, par ordre de l’Assemblée constituante, à qui j’ai fait savoir mes malheurs et les injustices exercées à mon égard.

Elle vous fera connoître, cette vie, les cruautés inouies qu’on a exercées sur toutes les parties de mon corps, qui sont encore couvertes de cicatrices des blessures qui m’ont été faites par mes bourreaux et par leurs satellites, et elle ne servira pas peu a vous convaincre du bonheur dû à la révolution et soutenu par la constitution, en vous mettant clairement sous les yeux toute

  1. Mme de Monaco m’a remis ceci en prison le 2 janvier 1793. (Note de Mme de Créquy)