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çon (de leur part), dit toujours accusation formelle.

M. de Penthièvre et mon oncle le Bailly me disaient toujours : – Comment pouvez-vous vous accommoder si parfaitement bien de cette bonne Marquise en si grande intimité ! Mme de Marbœuf est malade imaginaire et quinteuse, elle est jalouse, elle est exigeante, ennuyeuse… Et je répondais en les interrompant : — Je l’aime comme elle est.

Je n’ai jamais pu me décider à démentir les imperfections visibles ou les défauts réels de mes amis, et quand j’entrevois que le raisonnement y défaudrait, c’est avec mon sentiment pour eux que je les plastronne. Il n’en peut résulter aucune discussion ; il n’y a pas là de contestation possible ; on n’aigrit point ses adversaires ; on ne les force pas à persister, à s’opiniâtrer dans le dénigrement, et vous pouvez compter que nos amis s’en trouvent beaucoup mieux que d’une apologie maladroite.

Comme je m’ennuyais véritablement ce jour-là, il me prit fantaisie de rompre le tête-à-tête, au moyen de cette Buonaparté, que la maîtresse de la maison voulut bien faire introduire, et qui nous apparut escortée d’une légion d’enfans mal habillés.

Il y avait dans cette couvée d’oisillons corses un petit garçon qui venait de pleurer, car il en avait les yeux tout rouges, il avait l’air de dévorer ses larmes, et me voilà qui m’ingénie, pour passer le temps, d’en parler à Mme sa mère, avec un air de sensibilité bienveillante, en la questionnant sur le motif de cette affliction…