ens et ménagemens bien calculés. On estime que l’extréme roideur du Régent a tenu principallement à ces brusqueries mal avisées. Cependant il a promis et donné parolle formelle de faire commuter la peine de la roue en celle de la décollation pure et simple, par égard pour les familles et personnes intéressées à ce que les quartiers du nom de Horn ne soient pas diffamés, et pour éviter les nombreux et graves préjudices qui s’ensuivraient dans la fortune de ces mesmes familles, à qui leurs filles et leurs cadets resteroient à leurs charges pendant plus d’un siècle à venir, c’est-à-dire durant quatre générations, ce qui donne, à trente ans par chaque génération, un total de cent vingt ans, ainsi que l’avoit fait observer le Marquis de Créqui, ce que le Régent témoigna très bien comprendre et favorablement accueillir. Il alla mesme jusqu’à proposer de faire faire l’exécution capitalle dans la cour intérieure de la prison du palais, ce qui fut accepté par le Prince de Ligne et le Duc de Havrech seulement, car les deux autres commissaires s’étaient retirés de toute négociation, lorsqu’ils avaient jugé que le refus de garantir la vie sauve à leur parent, avoit été rejeté sans espoir de rémission. Ce point convenu pour la commutation du supplice infamant en l’autre peine non pas dégradante, le Duc d’Orléans est venu saluer tous ces membres de l’assemblée de famille, auxquels il a bien voulu faire faire force civilité, protestation de regret, assurances de bon vouloir, et cœtera. Tout le monde s’est séparé avec une grande et proronde tristesse, et l’on s’attendoit à ce que l’exécution auroit lieu le mardi saint 26 mars de la façon que l’avoit promis le Duc d’Orléans. On a su que la Marquise de Parabère et le Duc de Saint-Simon s’étaient chaudement entremis auprès de ce Prince, mais sans en pouvoir obtenir autre grâce que celle de ladite commutation de peine, cette Dame en ayant éprouvé une émotion à laquelle le Prince a en ses raisons pour ne pas se montrer fort sensible, et le Duc de Saint-Simon a cru pouvoir écrire à un de ces Messieurs qu’on devoist s’en tenir pour fermement assuré parce qu’il en avoit tiré, de son costé, parolle d’honneur du Duc Régent, lequel avoist judicieusement adopté cette méthode a suivre afin de ne pas punir non-seulement toute une famille pour un acte de folie d’un de ses membres, mais encore un grand nombre de maisons les plus illustres de l’Europe, et notablement de l’empire et des Estats du Roy Très Chrestien.
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