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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

l’église avec les mêmes précautions que nous avions prises pour y entrer. Très peu loin de là, mon libérateur s’arrêta à une maison qu’il me dit être la sienne ; il me fit entrer dans une chambre, et m’y ayant renfermée, il me quitta sur-le-champ. J’eus un moment de joie en me trouvant seule, mais je n’en jouis pas longtemps ; le souvenir des périls que j’avais courus ne me montrait que trop ceux auxquels ma Mère était livrée, et je restai tout entière à les tristes craintes ; je m’y abandonnais depuis plus d’un heure, lorsque M. Hardy (car il est temps que je vous nomme celui auquel nous devons la vie) revint et me parut avoir un air plus effrayé que je ne l’avais vu de toute la matinée. Vous êtes connue, me dit-il, on sait que je vous ai sauvée, on veut vous ravoir, on croit que vous êtes ici, on peut vous y venir prendre ; il en faut sortir tout de suite, mais non pas avec moi, ce serait vous remettre dans un danger certain, prenez ceci, me dit-il en me montrant un chapeau avec un voile et un mantelet noir. Écoutez bien tout ce que je vais vous dire, et surtout n’oubliez pas la moindre chose.

« En sortant de cette porte, vous tournerez à droite ; puis vous prendrez la première rue à gauche ; elle vous conduira sur une petite place dans laquelle donnent trois rues ; vous prendrez celle du milieu, puis auprès d’une fontaine, vous trouverez un passage qui vous conduira dans une autre grande rue ; vous y verrez un fiacre arrêté près d’une allée sombre ; cachez-vous dans cette