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SOUVENIRS DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

Ma nouvelle habitation se trouvait située sur le boulevard des Invalides, au bout de la rue Notre-Dame-des-Champs. C’était le Marquis du Lau d’Allemans qui l’occupait avant la révolution, et son nom des Oiseaux lui provenait du peuple et des bonnes d’enfans de ce quartier, au regard et à l’égard d’une belle volière qui se trouvait au bout du jardin de cet hôtel, et qui se voyait du boulevard[1]. Au premier coup de cloche de la révolution, les patriotes de la section Plumet-National n’avaient pas manqué d’escalader la grille ou les murs d’enceinte, et de venir briser les grillage de ladite volière, afin de rendre à la liberté tous ces malheureux esclaves qui ne s’en sont pas mieux trouvés que les Parisiens, car ils manquèrent de nourriture et ils furent escoffiés par des chats. Je n’avais aucune peine à faire convenir M. d’Allemans de ce que l’histoire de sa volière était l’image de la révolution française.

Je fus enchantée de retrouver là Mme Joseph de Monaco, qui, comme je l’espérais bien, me fut d’une grande ressource. Quoi qu’elle eût naturellement de sages pensée, des idées religieuses et des dispositions charitables, elle avait l’esprit très malin. Avec l’imagination gaie, elle avait le cœur triste ; c’est la plus aimable espèce de gens ; mais bien qu’elle eût acquis assez de connaissance du

  1. C’est à présent une communauté d’Augustines appelée Couvent des Oiseaux, où se trouve un des pensionnats les plus nombreux et les plus recommandables du royaume.
    (Note de l’Éditeur.)