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SOUVENIRS

un point de fait : et c’est à savoir que c’était Mme Roland qui dirigeait la conduite politique et tous les actes ministériels de son mari. Elle ajustait ses circulaires et rédigeait toutes ses notes officielles ; on la voit composer une adresse au roi constitutionnel pour exiger qu’il renvoie ses aumôniers, et pour lui reprocher, au nom du citoyen Roland, d’avoir été faire ses pâques à Saint-Germain-l’Auxerrois. On la voit écrire ensuite au prince-évêque de Rome, pour le prévenir, au nom de l’humanité et du Directoire exécutif de la république, d’abord, « qu’il était prince encore d’un État prêt à lui échapper ; ensuite, que la domination du Christ était tombée de vétusté ; que les siècles de l’ignorance, du despotisme, de la superstition, des rois et des prêtres, étaient passés pour jamais ; enfin, que les hommes ne pouvaient plus être attachés que par leur propre bonheur, et que telles étaient les maximes de la république française, trop sage pour avoir rien à craindre et pour avoir rien à taire. »

Il est à remarque que c’est Mme Roland qui se révèle à nous dans ses mémoires, comme auteur et rédacteur des écrits politiques de son mari, et quelques feuillets plus loin, elle ajoute, avec la confiance et la suffisance qui ne la quittent jamais, que toute la gloire qui attend M. Roland dans l’histoire de France et dans la postérité, sera fondée principalement sur la sagesse admirable et la haute sublimité de ses écrits ministériels. Parmi les décisions tranchantes et les faux jugemens de l’auteur, c’est véritablement le seul arrêt qui méritât confirmation et qui l’ait obtenue. Toutes les opinions de Mme Ro-