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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

aucun effet par une raison qui vous paraîtra singulière en pareille occasion, c’était parce que ce commandant général de la force armée se trouvait ivre-mort.

Le tumulte n’en était pas moins grand et moins effrayant dans tout Paris ; mais la Convention tint ferme (elle avait un décret de la providence à faire exécuter) ; la grande majorité de la population, c’est-à-dire tout ce qui n’était pas sans-culotte et salarié par la commune, accourut successivement autour de l’assemblée ; les malheureux Parisiens s’encourageaient les uns les autres, et plusieurs milliers de gardes nationaux entouraient déjà l’hôtel-de-Ville, en demandant le jugement et la condamnation de Roberspierre, à grands cris ! Toutes les rues-voisines de la place de Grève furent occupées par la garde parisienne, et dans un pareil moment, où la population reste toujours indécise et où Paris n’appartient à personne, c’est ainsi que les antagonistes de Roberspierre ont obtenu ce grand succès qui n’aurait pas manqué de leur échapper si les patriotes de la commune et les Jacobins n’avaient pas eu le général Henriot pour commandant.

Immédiatement après la dispersion des Jacobins, les honnêtes gens et surtout les jeunes gens de Paris affluèrent tellement à l’Hôtel-de-Ville, que les sectionnaires chargés d’y garder Roberspierre et ses consorts, ne purent en défendre les portes qui furent enfoncées à coups de madriers. On a dit que c’était alors que Roberspierre s’était blessé d’un coup de pistolet ; mais on a dit aussi que c’était une supposition de Tallien qui aurait eu ses raisons