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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

prise et si remplie d’admiration pour deux grands vases de Sèves qui sont accolés à la porte qu’elle se mit à crier, avant de saluer et de rien dire à la Duchesse d’Anville : Ah ! les Beaux Pots !

Il était fâcheux d’aller souvent dans les tribunes de l’Assemblée nationale à cause de la compagnie qui s’y trouvait. Un certain jour de belle séance, il y avait eu malentendu de la part de votre père ; il n’avait pas écrit au président, et l’on m’avait fait entrer dans une mauvaise logette à côté de la porte. Arrive une espèce de tricoteuse en gants de soie, qui riait à grande bouche en causant avec un jouvenceau couleur de rose et blond, qu’elle endoctrinait en philosophisme, et qui rougissait quelquefois, le pauvre enfant. Les voilà quis’asseyent et la conversation continue. J’entends qu’il est question de l’Écriture Sainte, et la dame se met à dire avec un air de malice et d’enjouement séducteur, que si la chaste Suzanne avait été une vieille femme entre deux jeunes gens, elle aurait eu plus de mérite… J’aperçois Mme de Milon qui m’indiquait une place à côté d’elle, je lui fais un signe affirmatif, et je me lève tout de suite ; mais voilà cette femme qui dit effrontément à son bachelier : — Il est bien contrariant pour nous que {{Mme|la Mise de Créquy ne veuille pas nous laisser l’espérance de profiter de sa conversation !… Je la regarde entre les deux yeux : — Pour ce que je vous aurais dit, vous n’y perdez pas grand’chose ! et je m’en allai sans autre compliment. On vint nous dire ensuite que c’était une madame de Condorcet.

Le Maréchal de Richelieu nous disait une fois