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SOUVENIRS

entre l’iniquité des révolutionnaires et la justice du ciel.

Un autre effet, presque miraculeux, des poursuites de ce misérable homme, c’est qu’ayant fait mettre des oppositions sur le paiement de tous nos revenus, il en est résulte qu’en dépit de notre inscription sur la liste des émigrés, aucun acquéreur ne s’est présenté pour acheter ni soumissionner aucune de nos terres ; et ceci par prévision, par méfiance ; en sorte que nous n’avons été dépouillés que de votre hôtel de la rue d’Anjou et de ces deux belles forêts de St.-Pol et de Vareilles sur lesquelles on a prétendu que les deniers dotaux de ma belle-fille se trouvaient hypothéqués. Quand on nous signifia juridiquement cette folle sentence, votre pauvre père était bien malade et j’étais sous clé, mais je me gardai bien d’interjeter appel au tribunal de cassation, et je ne manquai pas de faire la sourde et muette, en contrefaisant la morte et nous félicitant d’en être quitte à si bon marché[1].

J’avais été mandée pour le duodi, 5 floréal, au tribunal révolutionnaire, à l’effet d’être interrogée sur un vol de diligence qui devait avoir eu lieu dans les environs de Montflaux. C’était un des 24 substituts de Fouquier-Tinville, qui devait procéder à

  1. C’est depuis la mort de mon petit-fils et pendant la dernière maladie de son père, que tous les biens de ma belle-fille ont été vendus révolutionnairement. Nous avons été privés de nos revenus pendant 57 mois ; mais vous devez bien penser que c’était le cadet de mes soucis. J’ai la prévision de mourir bien seule et bien tristement, mon pauvre cousin ! (Note de l’Aut.)