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SOUVENIRS

exemple celui d’une belle Mme  de la Verpillière qui avait trouvé moyen de faire de son mari un gentilhomme de trois races, au lieu d’un anobli au premier degré : elle avait arrangé son affaire d’anoblissement de manière à faire donner des lettres de noblesse au bisaïeul de son mari, lequel bisaïeul était âgé de 95 ans et en enfance, à ce que disait Mme  Roland, et ce qui n’était pas hors de vraisemblance. Elle disait aussi que le père et le grand-père étaient morts depuis plusieurs années, ce qui lui faisait observer, avec assez de malice et de raison, que les deux générations nobles, intermédiaires entre l’Écuyer, premier anobli, et son arrière-petit-fis, le Chevalier, gentilhomme de trois races, ne subsisteraient jamais ; ce qui serait toujours d’une singularité surprenante. Du reste, elle ajouta que madame de la Verpillière faisait l’insolente, et sa manière de prononcer et d’accentuer ce dernier mot lui donna tellement la figure d’une Euménide, que je crus lui voir pousser, non pas des cornes au front, comme disait votre grand’mère de Sévigné, mais des cheveux de serpens !

Mme  Roland voulut ensuite me faire entendre avec un certain air d’exigence et de jalousie concentrée, qu’il était possible que la famille de son mari fût descendue du Maréchal de la Plattière, ce qui brouilla ses cartes et son enjeu sur mon tapis. Je lui répondis que le nom de famille de ce Maréchal était de Bourdillon et non pas Roland[1] ; et

  1. Cette assertion de Mme  de Créquy, ordinairement bien informée, ne s’accorde pas exactemenr avec le Nobiliaire du