eu la bonté de lui faire constituer une rente viagère de 700 livres, à percevoir sur les droits seigneuriaux de cette terre, et qu’il allait toucher directement du Sénéchal. Montorge avait encore obtenu de Mme votre mère une permission de chasse ; on entendait crier de temps en temps contre lui pour avoir tiré sur des chevrettes et des poules faisanes, mais il affirmait et jurait ses grands dieux qu’il n’avait tué que des mâles, et comme votre père ne s’en embarrassait guères, il ne s’en mêlait jamais.
Mon fils arrive à Saint-Fal avec l’intention de s’y reposer pendant une quinzaine, et deux heures après, il reçoit une insolente lettre, où l’on disait que s’il avait la témérité de paraître dans le bourg, on lui ferait un mauvais parti ; il ne manqua de s’y rendre à pied le surlendemain dimanche pour assister à la grand’messe, afin d’établir l’estime qu’il faisait de cette lettre anonyme et de ce donneur d’avis. Le curé vint au-devant de lui, comme à l’ordinaire, lui présenter l’eau bénite ; il alla s’asseoir au banc seigneurial, et le célébrant vint l’encenser comme si de rien n’était. Les curés de campagne ont toujours récalcitré sur la destruction de nos priviléges honorifiques, et c’est une justice à rendre au bas clergé. Aussitôt que votre père fut sorti de l’église, un spadassin déguenillé vint lui signifier, le sabre au poing et l’injure aux dents, qu’il eût à vider les lieux et s’en aller de son château dans les vingt-quatre heures ; cet homme avait osé tutoyer mon fils, et c’était quatre jours après la fédération de juillet.