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SOUVENIRS

et bien m’en fâche[1] ; il était mon parent éloigné par les d’Esclots (ce qui n’est pas, comme vous pouvez bien le penser, mon quartier de prédilection), mais il ne s’en prévalait jamais. Je lui faisais toujours adresser mes billets de part à la main, je prenais ses deuils de famille et je me rappelle très bien que je lui écrivis à l’occasion du mariage de mon fils pour lui demander son contentement. Il arrivait tout aussitôt chez nous pou y faire bisite, ou quand il était dans son intendance de Limoges, il nous répondait courrier par courrier ; mais ses formules était purement et simplement celles d’une affection respectueuse : il a toujours eu l’air d’ignorer que nous fussions parens, et quand votre père lui disait quelques paroles sur l’air du cousinage, il inclinait sa tête, en répondant avec un air sévère et froid que ce serait bien de l’honneur pour lui ! Sa famille est très noble et très ancienne en Basse-Normandie : on aurait pu supposer qu’il agissait de la sorte, avec nous, par simplicité modeste, mais j’ai toujours pensé que c’était par excès de fierté.

Je vous ai déjà dit que M. de Maurepas fut l’au-

  1. Anne-Robert Turgot, Marquis de Soumonts, Baron d’Estrepagny, Seugneur de Changy, Courcelles, Anvry, Chastenay, La Combe et autres lieux ; Commandeur de l’ordre du St.-Esprit, Conseiller du Roi en tous ses conseils, ancien Contrôleur Général des finances et ministre d’état de S. M., né en 1717, mort en 1781.

    « Parmi tous les gens qui s’occupent de nos affaires, disait le Roi Louis XVI, je ne connais que M. Turgot et moi qui aimions véritablement le peuple français.

    (Note de l’Édit.)