Page:Créquy - Souvenirs, tome 6.djvu/96

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
92
SOUVENIRS

les secours de l’État pour aucun individu que j’aie pu soulager par moi-même, et vous pourrez vérifier que le cinquième de mon revenu se trouvait employé de cette manière-là ; enfin je n’ai jamais ni poursuivi ni fait poursuivre aucune personne en justice, à moins que ce ne fût sur mes terres, en ayant la précaution de me faire tenir au courant des procédures, afin de les arrêter lorsque la charité l’exigerait. C’était là ma règle générale, et avant nos procès contre les Lejeune qui voulaient s’emparer de votre nom, et contre Nicolas Bezuchet qui voulait me faire traîner à l’échafaud, ce qui était certainement le cas de se regimber, je n’ai jamais sollicité la punition de personne, excepté du Vicomte de Choiseul, et voici comment.

Ce Vicomte était un petit diffamé très malveillant et maldisant, ce qui n’est jamais difficile ; mais il était malfaisant quand il pouvait l’être[1]. Apparemment qu’il m’en voulait parce qu’on ne le laissait jamais entrer chez moi ; et toujours est-il qu’il alla se vanter d’avoir contrefait mon écriture et ma signature en écrivant le billet suivant à M. Turgot.


« Aussitôt la présente reçue, ne manquez pas, mon cher monsieur, de donner une place de finances, et c’est une bonne place, entendez-vous bien, à ce brave garçon dont le nom se trouve effacé, mais c’est égal. Je ne l’ai jamais ni vu ni

  1. Arnould-Louis-César de Choiseul, Vicomte de la Baulme, ancien Colonel du régiment de Poitou, né à Versailles en 1755, mort à Paris en 1828.
    (Note de l’Éditeur.)