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vous conjure et vous supplie, mon cher ami, de ne rien publier sur un projet qui me paraît déraisonnable, avant que nous en ayons causé raisonnablement, si nous pouvons ; je vous conjure et vous supplie, encore une fois, mon bon Rousseau, d’aller vous établir à Jossigny où vous serez seigneur et maître, et pour entrer dans les menus détails, je vous répète encore une fois que vous y trouverez d’excellents vins dans la cave et des sucreries à l’office, avec de belles fleurs au jardin, de bons légumes au potager, des fruits au verger, des oiseaux dans la volière et force volaille à la basse-cour ; il y a toujours de la vaisselle d’argent, des bougies, des cristaux, du linge, et de la glace avec du bois de chauffage, ainsi que toutes sortes de provisions, jusqu’à des chandelles ainsi vous n’aurez besoin d’y porter autre chose que vos livres et vos habits. J’irai chercher votre réponse au premier beau jour, et je vous demande, en grâce de vous décider pour Jossigny[1].

Rousseau ne me répondit rien ; quand il revint à Paris, j’étais absente, et avant que je ne le pusse

  1. Ce châtelet qui m’a été légué par ma grand-mère, avait été célébré par un digne homme appelé Messire Jacques Levasseur, chanoine de Noyon, lequel était Aumônier de Mme  de Froulay. Il y composa deux poèmes intitulés : le Bocage de Jossigny, et le Rosier des Vierges, où se trouve compris le Verger des Nymphes, que fait mes délices.

    « Jossigny m’a sauvé la vie en mon séjour,
    « Et le gai Jossigny fait l’honneur de la Brie ! »


    (Note de l’Auteur.)