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mais il cherche à se rendre utile au vieux M. Wolf, lequel avait manifesté le projet et l’intention d’établir une habitation coloniale. Le jeune officier se charge de tous les arrangements préliminaires ; il fait réaliser une centaine de mille francs qu’il avait de patrimoine, en Champagne, où sa famille est réputée pour considérable ; il achète des terres et des esclaves, enfin, il organise et dispose un établissement de culture en société.

« Dans la familiarité qui s’ensuit avec Melle Wolf, il avoue qu’il croit la reconnaître, et le premier mouvement de cette jeune femme est celui du désespoir ; mais se rassurant sur l’expérience qu’elle avait faite de la prudence naturelle et de la discrétion de M. d’Aubans, elle lui fait jurer qu’il en gardera le secret le plus inviolable, et finit par se rassurer. Quelques mois après, les gazettes d’Europe annoncèrent la catastrophe qui venait d’arriver en Russie, et dont le dénouement fut la mort du Czarowitz. La Princesse, sa veuve, était morte civilement, elle se trouva honteuse et découragée de tout ce qu’il fallait faire et de ce qu’il faudrait subir pour rentrer dans sa possession d’état. Enfin, le sentiment passionné qu’elle inspirait au Chevalier d’Aubans n’avait pu échapper à sa pénétration, car il ne s’en cachait plus, il était partagé peut-être ; et pour surcroît d’embarras, le vieux domestique venait de mourir, après avoir testé en faveur du Chevalier auquel il avait, de concert avec la Princesse, légué sa moitié d’habitation. Elle n’avait plus que lui pour confident, pour