Page:Créquy - Souvenirs, tome 6.djvu/28

Cette page a été validée par deux contributeurs.

aussi bien que possible. On supposait dans le quartier qu’il était déjà mort, et c’était un bruit prématuré, comme vous allez voir.

M. l’Archevêque avait envoyé le promoteur de son officialité pour se concerter avec le malade, et M. de Villette était venu se mettre à la traverse en assurant qu’il était hors d’état de pouvoir écrire ou parler. Tous les philosophes étaient dans une angoisse abominable, et pour entraver les négociations de l’officialité métropolitaine, on imagina d’embarquer et d’embarrasser le clergé paroissial de Saint-Sulpice dans une correspondance avec M. de Voltaire, à l’effet de gagner du temps. Il avait si bien la tête à lui, Voltaire, qu’il écrivit dans la soirée de ce jour-là ce qu’on va lire, et l’on ne saurait douter qu’il ne fût l’unique auteur de cette lettre où l’on reconnaît ce ton de persiflage honnête et perfide dont cet homme avait le secret et dont on ne savait quelquefois comment se fâcher.

À Monsieur le Curé de St-Sulpice.
Monsieur,

« M. le Mis de Villette a cru pouvoir m’assurer que si j’avais pris la liberté de m’adresser à vous-même pour entendre ma confession, car ce n’est plus de ma déclaration qu’il s’agit, vous auriez eu la bonté de quitter vos importantes occupations pour venir auprès de moi, et pour y remplir une fonction qui me paraîtrait subalterne, attendu surtout que je ne suis qu’un passager dans votre