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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

toute immunité. Il est inutile de faire observer à Votre Altesse la différence de la situation où se trouvait le Cardinal de Retz avec celle où se trouve M. le Cardinal de Rohan ; il n’y a sans doute aucune parité possible entre conspirer pour s’emparer forcément de la personne du Roi, et la situation d’un homme qui se trouve nommé dans une misérable intrigue, où la femme d’un officier de la maison du Roi a fabriqué des billets, des lettres et de fausses signatures de la Reine. Voilà tout ce qu’on est en droit de reprocher à notre cher Cardinal, Madame ; et puisqu’on ne l’accuse de rien qui puisse intéresser directement la personne du Roi ni la sûreté de l’État, nul doute que le droit commun ne doive subsister pour lui dans toute sa force.

« M. le Cardinal a pu se laisser tromper par une intrigante, et je vous dirai que deux ministres du Roi, qui ne s’en vantent pas aujourd’hui, l’avaient été par cette Mme  de la Mothe, il y a de cela, tout au plus dix-huit mois. Elle a trouvé moyen de leur escamoter plus de vingt mille écus en argent comptant, et si M. le Cardinal a pris trop de confiance dans les paroles de cette habile intrigante, il n’a pu douter au moins de l’authenticité de certains actes et de l’autorité de certaines pièces émanées de ces messieurs, et que cette femme avait à sa disposition. C’est une manœuvre infernale, ou c’est de la part des autres ministres une affaire de stupidité sans exemple.

« Ne croyez pourtant pas, Madame, qu’il y ait de l’impéritie de la part de M. le Garde-des-