Page:Créquy - Souvenirs, tome 6.djvu/131

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
127
DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

ploi de l’harmonica dans les cas de surdité, car on assurait que la Marquise Lecamus lui devait sa guérison radicale[1].

Le docteur allemand préleva tout au moins cent cinquante mille écus sur la crédulité parisienne, au moyen de la souscription de M. Bergasse, et l’Avocat-Général au parlement de Dauphiné, qui s’appelait M. de Servan, fit paraître une brochure de sa composition, dans laquelle il nous conseillait d’ériger des statues sur des places publiques en l’honneur de M. Mesmer. Il aurait demandé des temples, s’il avait osé. Le fougueux d’Espréménil, assisté du Mis de la Fayette, allait pérorant et déclamant contre la superficialité du vulgaire et pour l’infaillibilité du magnétisme ; et c’était, je vous assure, avec autant d’enthousiasme et d’opiniâtreté qu’on les a vus déblatérer, pendant le reste de leur vie, contre les institutions surannées, en faveur de la liberté qui nous a procuré le régime de la terreur[2].

  1. Quant à Marguerite Lecamus, Marquise Lecamus et nièce du Cardinal Lecamus, Évêque de Grenoble, je vous dirai que son mari fut le premier gentilhomme français qui s’avisa d’appliquer un titre seigneurial sur son nom de famille et sans prédécession d’un article datif. Quand on lui demandait des nouvelles de son Marquis. — J’en suis excédée, et surtout pendant la nuit, répondait-elle, mais j’espère bien que le magnétisme m’en délivrera ! Elle avait entendu qu’on parlait de son rhume et non pas de son mari, tant elle avait été bien guérie par l’harmonica !
    (Note de l’Auteur.)
  2. Antoine Mesmer, qui se qualifiait premier médecin du Landgrave de Hesse et de S. A. le prince de Reuss, est mort à Stenits en 1815, âgé de 82 ans.
    (Note de l’Éditeur.)