ma cour à Versailles, Monsieur n’osa pas me dire un seul mot qui pût me faire songer à sa belle épître et, ses prosopopées de collége. Nous avons toujours été bons amis depuis ce temps-là ; jusqu’à l’époque de la révolution, s’entend ; car un Prince qui nage entre deux eaux, qui sourit à la plébécule, et qui semble incliner du côté dé la démocratie, me paraît, un homme insupportable.
Monsieur ne manquai pas d’organiser d’autres mystifications, qui lui réussirent beaucoup mieux que celle de notre énigme. Par exemple, il imagina de faire parler dans tous les journaux de Paris d’un animal extravagant pour sa conformation, car il avait, disait-on, des pieds d’autruche et des cornes de buffle, avec une queue de singe et la crinière d’un lion. On en fit graver des milliers d’estampes, et l’on nous écrivait de partout pour nous demander quelques détails sur cette curiosité prodigieuse. Tout le peuple était persuadé que rien n’était plus vrai, ce qui réjouissait beaucoup Monsieur et ce qui m’ennuya prodigieusement. Une autre fois, il fit insérer dans le Mercure de France une sorte de procès-verbal de la douane de Marseille au sujet de l’ouverture d’une malle où notre consul d’Alexandrie avait mis des œufs de crocodile, lesquels étaient éclos pendant la traversée, lesquels étaient sautés sur les douaniers pour les dévorer, etc. Le Journal des Savans se mit à disserter là-dessus, et voilà ce qui nous parut divertissant.
Monsieur faisait joliment les vers, il m’avait envoyé sa traduction de la première épître d’Horace, que je suis fâchée, d’avoir perdue ; je ne retrouve ici