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SOUVENIRS

souvent trempée de sang chrétien, et qu’il me conseillait de la porter dans une grande salle appelée l’Armurie, où il n’entrait jamais. Le concierge ajouta que c’était dans l’armurie que je verrais déposées toutes les épées des Foulquerre défunts, avec celles des adversaires dont ils avaient triomphé ; que tel était l’usage établi depuis le siècle de Mellusine et de son mari le comte de Poitou, Geoffroy à-la-Grand’-Dent. Je suivis dans l’armurie ce bavard de concierge, et j’y trouvai des épées de toutes les formes, de toutes les tailles et de tous les siècles, ainsi que de curieux portraits, à commencer par celui de Foulques Taillefer, comte d’Angoulême, lequel avait fait édifier le château de Têtefoulques pour un sien fils Manzier (c’est-à-dire bâtard), lequel fut créé Sénéchal de Poitou, et devint la souche des Foulquerre de Têtefoulques.

« Le portrait du Sénéchal et celui de sa femme, Isabeau de Sainte-Hermine, étaient placés des deux côtés d’une immense cheminée. Ils avaient un grand air de vérité. Tous les autres portraits me parurent également d’un assez bon faire, quoiqu’ils fussent de travail gothique ; mais aucun n’était aussi frappant que celui de Foulques Taillefer, armé de toutes pièces et saisissant sa rondache, qui était armoriée de trois lions léopardés, montés et diffamés (en signe de bâtardise apparemment). La plupart des épées étaient réunies et ajustées en trophée au bas de ce portrait.

« Comme cette salle était la seule du château