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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

lumières, à votre zèle pour le bien public, à votre affection pour mon service, et je désire que vous viviez ensemble ainsi que par le passé, c’est-à-dire en bons amis.

Les princes ont, comme on sait, beaucoup de raisons pour être en garde contre la flatterie, et, du reste, on a pu remarquer chez M. Beaujon que les financiers n’auraient pas moins de peine à s’en préserver que les rois. À la même occasion de cet attentat régicide, les États d’Artois s’étaient rassemblés sous la présidence de mon fils, premier Baron de la province, et les voilà qui députent auprès du Roi plusieurs notables du second ordre, afin d’exprimer à S. M. leur désolation de ce que le criminel était Artésien, et jusqu’ici la chose était à merveille ; mais ces gentilshommes voulaient absolument nous faire payer le double de ce que la province devait fournir en argent et en hommes pour le service de la couronne, et ceci ne faisait pas plus le compte de la haute noblesse et du haut clergé que du tiers-état. Je fis un Mémoire où je représentais qu’il y aurait conscience à profiter d’une proposition qui nous semblait téméraire, en ce qu’elle devrait porter sur le pauvre peuple, en définitive. Les récoltes de l’année précédente avaient été si mauvaises que l’Évêque d’Arras avait fait remise à ses fermiers et ses vassaux du tiers de ses revenus. Les principaux seigneurs du pays s’étaient cotisés avec l’abbaye de Saint-Wast pour acquérir, faire arriver et distribuer charitablement des grains de semaille aux pauvres laboureurs, et mon fils en avait déboursé plus de mille écus, sans compter l’abandon de ses droits seigneuriaux et