Page:Créquy - Souvenirs, tome 4.djvu/41

Cette page a été validée par deux contributeurs.
37
DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

leur autre branche : — Mais je les renie de toute ma force, dit-elle, et c’est afin de nous mettre au-dessus d’un Maréchal de France et d’un titre de Duc. Il n’appartient pas à tout le monde de regarder un bâton de Maréchal et un manteau ducal de haut en bas. Cela nous donne plus grand air et cela me paraît de fort bonne grâce. J’ai mis cela dans la tête de mon frère, et voilà ce qui nous décide à persister. Je ne le dis qu’à vous, parce que vous êtes une personne d’esprit ; n’en parlez point, mais voilà le dessous de nos cartes[1].

 
En voilà-t-il des pals en écus couronnés,
Des Lions lampassés, des Aigles allumés,
Lambrequins, Dextrochère ou Gonfanon sinistre,
Et tout ce que d’Hosier minute en son registre !
Ah ! remontez en selle, et, partant de ces lieux,
Allez, Madame, allez avec tous vos aïeux,
Sur les pompeux débris des lances espagnoles,
Coucher, si vous voulez, aux champs de Cérisoles.
Allez, je vous conjure, y chercher votre époux :
Nos modernes lambris ne sont pas faits pour vous[2] !

Voilà qui s’ajuste admirablement et qui tombe

  1. Le Maréchal de Mailly a péri sous la hache révolutionnaire à Arras, en 1794, âgé de quatre-vingt-six ans. Il est monté résolument sur l’échafaud. C’était un homme à cœur de lion, comme il y parut le 10 août, et l’on a vu dans les journaux que 13,000 citoyens de son ancien gouvernement de Roussillon souscrivirent une pétition pour demander sa mise en liberté, à raison des services qu’il avait rendus à leur province, et notamment pour avoir fait rétablir le Port-Vendre, où les navires ne pouvaient plus relâcher depuis environ deux cent cinquante ans. Il n’a laissé qu’un fils, qui reste le dernier de cette grande maison.
    (Note de l’Auteur.)
  2. Deuxième variante à la satire de Boileau. Remarque de la Monnoye, Manus. à la bibl. royale, page49.
    (Note de l’Édit.)