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SOUVENIRS

nôtres. — Mauvais, mauvais, profanatoire ! lui dit M. de Durfort à l’oreille, et Richelieu se releva d’un air contrit. Il a conservé cet air-là pendant tout le temps, ce qui n’a pas empêché qu’une des convulsionnaires vînt lui dire : — Donnez-moi donc secours, petit malicieux ! par façon de contre-vérité railleuse, à cause de l’air innocent qu’il avait pris. Il s’était fait une physionomie si drôle que nous évitions de le regarder pour ne pas rire. Il a donné des coups de pied dans le ventre à cette femme tant qu’elle a voulu. Il avait voulu prendre une bûche afin de la secourir avec plus d’efficacité, mais le directeur s’y est opposé, en disant qu’il y avait manière de s’en servir pour donner les secours, et qu’elle n’était connue que des éprouvés. Au moment de notre arrivée, il y avait trois femmes en convulsion, dont un jeune garçon qui avait déjà de la moustache. C’était un drôle assez trapu, râble, et qui parlait bas-normand. Je croirais assez que le directeur n’était pas la dupe de son costume. Richelieu s’est mis à lui porter secours à grands coups de souliers ferrés, de telle sorte qu’elle en jurait entre ses dents, cette convulsionnaire. Je l’ai pris par le bras en lui disant de se tenir tranquille, et qu’il nous ferait assommer par représailles. Il avait donné parole d’honneur qu’il m’obéirait sur toute chose, il a tenu parole à peu près, et tant qu’il a pu. Le directeur est un père de l’Oratoire dont je n’ai pu savoir le nom. Il a commencé par porter ce qu’ils appellent des secours à une vieille femme