Page:Créquy - Souvenirs, tome 3.djvu/208

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
204
SOUVENIRS

Mme de Beauvau lui fit demander s’il ne serait pas possible qu’elle pût entrer dans le couvent pour lui faire en deux mots une révélation des plus importantes ; et Mme de Panthemont fit répliquer que la chose était impossible, à moins d’en avoir obtenu la permission de l’Archevêque de Paris. Mme de Beauvau remonta dans sa voiture, et s’établit stationnaire à la porte de l’église, afin d’y guetter l’arrivée du Prélat.

Cependant les carrosses dorés, les vis-à-vis à sept glaces, et les voitures princières et ducales avec leurs impériales en velours cramoisi, les magnifiques attelages à six chevaux empanachés et harnachés de riches galons de livrée, enfin la foule bruyante et bariolée des laquais, remplissaient la belle rue de Grenelle, en obstruant tous les abords de Panthemont. Il était onze heures sonnées, lorsqu’un valet en habit de drap d’argent galonné de velours cramoisi s’approcha précipitamment du carrosse de sa maîtresse. — Madame la Maréchale, M. l’Archevêque est arrivé par l’intérieur : il est entré par la porte du cloître ; il est déjà dans le sanctuaire et la cérémonie va commencer. Mme de Beauvau s’empressa d’écrire quelques lignes sur ses tablettes, en ordonnant à son grand laquais de fendre la presse et de la conduire à la sacristie sans perdre un moment.

L’église était décorée de superbes tapisseries, au-dessus desquelles on voyait régner une litre de damas blanc frangée d’or et couverte d’écussons armoriés ; on avait suspendu, suivant l’usage, un large pennon blasonné des armes et des alliances de cette noble fille à la place de la lampe du sanctuaire,