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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

et qui sera parfaitement bien gardé, car il n’y a rien.

Cette conversation avait lieu chez moi, devant M. le Duc de Penthièvre, et ce prince était pleinement convaincu que Voltaire avait composé cette mystérieuse histoire à dessein de passer pour un écrivain des mieux informés.

Comme je me suis promis d’être juste et de vous dire le pour et le contre, je dois ajouter, ici que l’opinion du Comte de Maurepas n’était pas tout-à-fait aussi défavorable à Voltaire que celle de M. le Duc de Penthièvre, et tout ce que lui reprochait M. de Maurepas, c’était d’avoir fabriqué une sorte de poème héroï-tragique au moyen d’un chapitre de Guzman d’Alfarache. Je dois ajouter aussi que le Baron de Breteuil est absolument du même avis que M. de Maurepas, son prédécesseur au ministère de la maison du Roi ; et voici la pointe d’aiguille sur laquelle Voltaire, aurait voulu faire tenir sa construction romanesque.

Charles de Gonzague, Duc de Mantoue et de Montferrat, avait pour femme une Archiduchesse d’Autriche, ennemie passionnée de la France, et pour secrétaire intime, ou confident principal un Piémontais qui se faisait appeler le Comte Mattioli. Cet ami du prince avait un génie d’intrigue infatigable, et l’impunité dont il jouissait avait tellement enflé ses voiles et détourné ses voies qu’il osa faire arrêter et dévaliser un courrier chargé des dépêches du Roi Très-Chrétien pour le Duc de Créquy, son Ambassadeur à Rome. Le Pape Alexandre était en danger de mort ; il était question de procéder à la