Page:Créquy - Souvenirs, tome 3.djvu/159

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
155
DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

de Madame pour des braconnièreset des sabotières ?

— Allons, m’âme de Blot, soyons bonnes gens. Je m’en vais vous envoyer, par extraordinaire, un petit-verre de ce bon vin de Chypre, à qui j’espère que vous allez faire grâce en l’honneur de la déesse Vénus. Il est de la Commanderie, le meilleur crû de l’île.

— Monseigneur !… me prenez-vous décidément pour une bacchante, une Érigone ? Est ce que j’ai l’air d’une panthère ?… Alors il ne reste plus qu’à m’ajuster avec des guirlandes de lierre, avec des crotales, avec le thyrse et les tambourins des Ménades !… Où sont-elles les touffes de pampre et la coupe ciselée du fils de Sémélé ?…

— Tiens, c’est tout-à-fait comme dans ce grand tableau de ma salle à manger du Raincy !

— Mon’Dieu, Monseigneur, est-ce que les femmes, dont la substance aérienne ?… — Ah ! les femmes !… Comment des femmes (de bonne compagnie) peuvent-elles se résoudre à manger des choses ignobles ? Les femmes de bonne compagnie sont comme les abeilles et les papillons, qui ne vivent que du suc des fleurs, des baisers du Zéphyre et des pleurs de l’aurore aux doigts de rose.

— Vous êtes une savante et une sylphide m’âme de Blot, une véritable sylphide de Marmontel, à la quintessence de roses. — Allons, va pour une sylphide ! À votre santé, m’âme de Blot.

— Madame, me disait-elle un jour à l’hôtel Tolouse, je crois que M. le Duc de Penthièvre a l’honneur d’aller tous les jours à l’hôtel de Créquy ? Je lui répondis que je la suppliais d’enregistrer ma