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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

d’Orléans l’achète, on le démonte, ensuite elle en fait placer tous les morceaux dans un petit salon que sa Dame d’honneur occupait au Palais-Royal (à L’entresol). La boule en touchait le parquet, ses branches empêchaient d’ouvrir les portes et les fenêtres ; enfin les agréables figures de Colombine et d’Arlequin, d’Isabelle et du beau Léandre (qui n’avaient pas moins de quatre pieds de taille), avaient été rangées tout autour du salon, dont il avait fallu retirer tous les meubles, et tout ce qu’on pouvait faire était de circuler à grand’peine au milieu de ces charmans objets d’ornement. C’est une mystification que l’aimable Princesse a fait durer jusqu’à sa mort, et toujours sans que Mme de Polignac ait osé lui manquer de respect en envoyant le diable de lustre dans un de ses châteaux ou dans un grenier de son hôtel à Paris. Ce qu’il y a de plus étrange en tout ceci, c’est que la Dame d’honneur était non moins opiniâtre que la Princesse, et quelle voulait arracher les yeux à toutes les personnes qui lui conseilleraient de s’en aller dans son beau salon de la rue Royale, après avoir donné sa démission. C’était sûrement pour avoir égard aux supplications de M. le Duc d’Orléans, qui tenait beaucoup à conserver le nom de Polignac aux premières lignes de son almanach, la plupart de ses officiers étant de la plus médiocre noblesse.

Une autre fois Mme la Duchesse d’Orléans s’amusait à faire appliquer délicatement un petit bonnet de gaze, orné de fleurettes et de rubans couleur de rose sur la perruque poudrée d’un vieux Baron d’Estélar qui était un ancien aide-de-camp du