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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

disais-je, était certainement très bien placée dans cette belle collection des portraits enluminés de la Régence et des arabesques de Bagnolet (en grisaille). On n’a rien vu de pareil à ces dessins-là, sinon dans les estampes du poème de Longus, qui ont été dessinées et gravées par le Régent.

Indépendamment de son intempérance en faits et gestes, elle était d’une intempérance de langue à n’y pas tenir, et, c’était à qui se revancherait de son arrogance offensive. À l’époque où l’on soupçonnait Mme de Coislin d’avoir imité la Duchesse de Châteauroulx, sa cousine en acceptant quelques bienfaits du Roi, cette belle Comtesse était séparée de son mari qui ne lui donnait pas grand’chose, et ceci n’empêchait pas qu’elle ne fit bâtir un des plus beaux hôtels de la place Louis XV, et qu’elle ne fût en possession d’un magnifique attelage à six chevaux blancs. La Duchesse d’Orléans s’avisa de lui demander en plein salon du Raincy : « Qui vous a donné de si beaux chevaux ? — Madame, lui répliqua la Comtesse en la regardant fixement, ce n’est pas M. de Melfort, ce n’est pas M. de Polignac, ce n’est pas le petit M. de Varennes et ce n’est pas non plus le comédien Grand-Pré. J’ai 29 ans passés, Madame, ajouta-t-elle avec son air de hauteur amère et son diable de sourire à ressorts ; je pourrais être la mère de ce petit de Varennes… »

La Duchesse d’Orléans, qui aurait été la mère de Mme de Coislin, et par conséquent la grand’mère du petit jeune homme, en perdit toute contenance de femme galante et toute mesure de princesse. Elle