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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

lier que ce soit cette famille bretonne qui se trouve en possession de l’héritage des anciens Rois d’Arles, dont il existe encore une branche cadette en Provence. Ce sont des seigneurs qui portent le nom de Blacas et qui proviennent évidemment de la maison royale de Baux, dont ils tiennent leur seigneurie patrimoniale d’Aulps en Provence, et dont ils ont conservé les armoiries pleines et sans brisure (c’est une comète à seize rayons). Si vous rencontrez jamais quelques personnes de ce nom-là, j’ose attendre de vous, mon Enfant, que vous aurez plus d’égard à la noblesse de leur extraction qu’au mauvais état de leur fortune.

À propos des Goyon-Matignon, je vous dirai qu’ils ont produit un des hommes du monde le plus admirablement prodigieux pour la bêtise, ou plutôt la sottise ; car celui-ci n’était pas tout bonnement stupide, il était dénigrant, loquace, épilogueur et susceptible à l’excès, par-dessus le marché. Il ergotait continuellement sur toute sorte de sujets avec un certain air de satisfaction dédaigneuse et méprisante qui l’aurait fait souffleter cent millions de fois s’il n’avait pas été coiffé d’une mitre épiscopale dont on l’avait encasqué, Dieu sait comment, car il paraît que sa famille l’avait tenu caché dans un séminaire jusqu’au moment de sa présentation à Versailles, où sa tante, la Duchesse de Longueville, avait eu l’attention de recommander qu’on ne lui laissât proférer aucune parole. Elle avait fait dire au Roi et au Père Le Tellier qu’il était de bonnes mœurs, ce qui n’a jamais été démenti ; et puis qu’il était dans la bonne doctrine, ce qui n’était pas