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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

chicaneur de la terre[1]. Voilà tout ce que j’ai su jamais de ce procès-là ; mais tant il y a que nous

  1. François-Joseph le Lieure (ou Le Lièvre, comme on l’écrit à présent), Marquis de la Grange-le-Roy, de Fourilles et d’Attilly, Lieutenant-Général Commandant des mousquetaires de la garde du Roi Louis XV etc. Il était de même famille que cet inflexible et courageux Jean Le Lieure, avocat-général au Parlement de Paris sous les règnes de Louis XII et de François Ier, lequel avait entrepris de s’opposer à l’enregistrement du Concordat avec Léon X, en dépit du Pape et du Roi, ce qui n’aboutit qu’à l’empêcher d’être Chancelier de France. C’est une des familles les plus immensément riches du royaume, et c’est une famille de la plus vieille robe, ce dont résultait toujours que tous les présidens et conseillers des anciennes familles du Parlement étaient obligés de se récuser et de s’abstenir de siéger sur les fleurs-de-lys quand on jugeait ses procès. Les plus minimes et les plus nouveaux dans la magistrature avaient la vanité d’imiter en cela Nosseigneurs du grand banc ; c’était le bel air du Parlement de Paris, et il n’y avait si mince conseiller des requêtes ou des enquêtes qui ne montrât la prétention de se faire récuser comme parent, toutes les fois qu’on avait à juger un procès du Marquis de la Grange, ce qui ne manquait pas d’arriver souvent. Il avait épousé Mademoiselle de Méliand, dont le grand-père avait été le successeur de mon père dans ses deux ambassades de Suisse et de Venise. La présidente de Méliand de Choisy, femme de cet ambassadeur, était Mademoiselle Bossuet, nièce de l’Évêque de Meaux, et nous disions qu’elle tenait beaucoup moins de l’aigle que de l’oie. Comme nous sommes restés tout-à-fait brouillés par suite de nos procès pour la succession des Comtes de Vertus et de la Princesse de Courtenay, je ne sais si le Marquis de la Grange existe encore aujourd’hui ?
    (Note de Mme de Créquy.)

    L’auteur de ces mémoires a commis ici, contre son ordinaire une légère inexactitude ; car d’après l’Histoire des grands-officiers de la couronne, le Marquis de la Grange ne pouvait pas être le neveu et devait être le cousin-germain de Mademoiselle de Vertus, laquelle était fille d’Anne-Judith Le Lieure de la