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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

toute justice ! Je ne doute pas que le manque de respect, ou pour mieux dire l’impertinence des jeunes gens d’aujourd’hui pour les vieilles femmes, ne provienne, en grande partie, de leur sot accoutrement car enfin l’on ne saurait exiger ni s’attendre à ce que des étourneaux puissent distinguer la différence qui se trouve entre la docilité pour l’usage et la prétention ridicule. Une vieille femme est habillée comme une jeune personne ; cette vieille femme est ridicule à cause du parallèle ; elle est ridicule et c’est tout au moins, car la plus légère apparence de prétention doit la faire paraître odieuse, abominable, et je n’ai jamais pu m’expliquer autrement la réprobation universelle et le décri général où sont tombées les pauvres vieilles femmes. J’en connais qui n’osent pas s’habiller raisonnablement de peur que les enfans ne leur jettent des pierres quand elles descendent de voiture à la porte des églises, ce qui serait encore pire que de les coudoyer et de leur marcher sur les pieds dans les salons. Tant il y a qu’on est bien malheureuse d’être une vieille femme par le temps qui court, et que je ne m’en consolerai jamais !

On ne saurait avoir mieux dépeint la Maréchale de Luxembourg que ne l’a fait Mme de Flahaut dans un de ses jolis romans, et son mérite est, suivant moi, d’autant plus grand, qu’elle n’avait jamais été de la société de la Maréchale, à beaucoup près. Ce n’est pas chez son père, M. Filleul, ni chez son beau-père Labillarderie, qu’elle aura pu trouver le type du meilleur goût dans le plus grand monde, qu’elle a deviné sans l’avoir connu, et l’on a beau