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SOUVENIRS

Il avait été résolu que chacun signerait cette requête en arrivant chez M. de Créquy, sans avoir égard à l’exigence ou la prétention des préséances, et quand on apprit que cette liste se trouvait composée des noms les plus éclatans en illustration, il y eut bon nombre de gens qui furent contrariés de ne pas s’y trouver inscrits ; ce dont il est résulté des bouderies, des fâcheries et même des brouilleries à n’en pas finir, car cinquante ans après ceci, la Duchesse de Mazarin se plaignait encore d’un affront que son père avait reçu par M. de Créquy, disait-elle. Je ne me souvenais de rien mais je finis par découvrir que c’était au sujet de cette requête.

Le Régent nous avait fait introduire dans la salle du conseil dont ses principaux officiers nous firent les honneurs, et ceci dans un profond silence. Dix minutes après, il nous fit avertir qu’il attendait nos Députés dans son cabinet, et ce furent le Cardinal de Rohan, le Duc d’Havré, le Prince de Ligne et votre grand-père qui furent lui présenter notre supplique. La chose avait été convenue d’avance. Tous les visages exprimaient un sentiment d’anxiété profonde ; on voyait au recueillement de certaines femmes qu’elles s’étaient mises en prières, et je me souviens que cette bonne Princesse d’Armagnac s’était mise à réciter son chapelet.

Le Duc d’Orléans commença par dire à ces Messieurs que celui qui pourrait lui demander la grace du criminel (c’est le mot dont il se servit) serait plus occupé de la maison de Horn que du service du Roi. M. de Créquy le supplia de vouloir bien écouter notre requête. — En vous accordant qu’il