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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

la mode qu’il en avait prise et gardée du temps de la Régence, dont il avait conservé d’autres habitudes moins excusables que cette affectation de mauvais langage et de prononciation vicieuse). V’nez donc par ici… V’la quéques louis que m’sieux l’Comte de Chinon m’a chargé de vous donner pour vos étrennes, et il jette la bourse par la fenêtre. — Monsieur, dit-il en se retournant, à votre âge, et quand on est destiné à porter le nom de Richelieu, faut pas mettre son argent dans son secrétaire, et faut jamais garder cinquante louis dans sa poche à ne rien faire

On a fait beaucoup d’histoires de galanterie sur la Comtesse d’Egmont, et notamment on avait beaucoup parlé de Rhullières[1] ; mais la vérité certaine est qu’après la mort de M. de Gisors elle n’a jamais eu qu’un seul attachement qui n’a cessé de remplir son cœur et sa tête, et qui l’a suivie jusqu’au tombeau, où le chagrin l’a fait descendre prématurément. C’est une histoire tellement romanesque et si bien prouvée que la moitié du monde a refusé d’y croire, tandis qu’une autre partie du public ne pouvait en douter, malgré son invraisemblance, et c’est de cette dernière partie du monde que je me suis trouvée par suite de nos relations intimes avec l’hôtel de Richelieu. Ce n’est jamais d’un courtaud de boutique qu’il a été question, et les mauvais romanciers ont confondu l’aventure de M. d’Egmont avec une des histoires de la Du-

  1. Claude-Henry-Carloman de Rhullières, auteur de l’histoire de l’Anarchie de Pologne, etc., né en 1733, mort 1791.