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SOUVENIRS

frères de l’Observance, vingt-huit franciscains Récollets, trente-trois Augustins, vingt-et-un Jésuites et pas un Oratorien. À propos des RR. PP. Jésuites, il est à noter que leur communauté de Marseille était peu nombreuse, et qu’il n’en avait survécu que deux sur vingt-trois. Mais écoutons parler l’Évêque de Marseille à ses malheureux diocésains :

« La mort a fauché jusque sous nos pieds, Ô Nos très chers Frères ; la peste a gagné le toit du pasteur, où tous nos officiers et domestiques en sont frappés. N’allez plus nous chercher dans un palais ; notre seule place est dans les églises et les voies publiques, à la porte de notre cathédrale, au milieu des rues de cette ville affligée, partout où nous pourrons trouver des malades à soulager et des infortunés à bénir. Sans entrer ici dans le secret de tant de familles et de tant de maisons désolées par les horreurs de la peste et de la faim, où l’on n’entendait autre chose que cris d’angoisses, où des corps morts pourrissaient à côté des malades, et souvent sur une même couche ; sans parler de toutes les horreurs qui n’ont pas été publiques et dont notre cœur de père est resté navré, de quels spectacles affreux n’avons-nous pas été, pendant quatre mois, Nos très chers Frères, et ne sommes-nous pas encore les témoins ! Nous avons vu toutes les rues de cette ville bordées des deux côtés par des cadavres à demi corrompus, et si remplies de hardes, de meubles et autres effets pestiférés jetés par les fenêtres, que nous ne savions où mettre les pieds, ni comment y trouver place pour soi-