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SOUVENIRS

qu’il en résulta que j’épousai M. de Créquy avec lequel j’ai passé trente années d’un bonheur sans nuages et sans pareil ! Si je n’étais pas devenue une riche héritière, mon mariage avec M. de Créquy n’aurait vraisemblablement pas eu lieu, parce que toutes vos terres de famille étaient accablées d’hypothèques : votre grand-père aurait été obligé de s’allier à quelque famille de finance, ce qui n’était jamais arrivé dans votre maison, et ce qui l’aurait tellement contrarié qu’il aurait bien pu ne s’y décider jamais et ne se pas marier du tout[1].

Pour en revenir à mon frère, il était mort de la petite vérole, qui était venue se compliquer avec les suites d’une affreuse blessure qu’il avait reçue à l’armée du Maréchal de Villars, où il commandait l’ancien régiment de mon père, Royal-Comtois, et c’était dans les premiers jours de l’année 1713. Ma tante de Montivilliers avait eu la précaution de me faire préparer à cette triste nouvelle, en conséquence de ma tendresse pour mon frère et par suite des ménagemens que demandait mon âge, ce qu’on fit durer de quatre à cinq mois, et ce qui fut pour moi

  1. Voici les titres domaniaux et féodaux que Madame de Créquy portait de son chef et qu’elle prenait dans ses actes juridiques : Marquise d’Ambrières et Comtesse de Montflaux, Baronne de Gastines-les-sept-Tours, Dame Haute-Justiçière, Châtelaine et Patronne de Saint-Denys-lez-Gastines, de Vignaulx-le-Froullay, de Marottes, de Montchéorier, du Tremblay, Launay-sur-Sarthe, Avrigny, Jossigny, Saint-Solaine et autres lieux ; Grand’Croix de l’Ordre de Malte ; et puis, suivaient les qualifications qui lui provenaient, en communauté, du chef de M. de Créquy.
    (Note de l’Éditeur.)