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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

lification de Monseigneur n’est accordée par nous autres aux maréchaux que parce qu’ils sont les juges de la Noblesse, et les anciens n’aimaient pas du tout à se la voir donner par des roturiers. Je vous dirai, du reste et sauf le respect pour le Bâton, que le Maréchal qui se montrait si nobiliaire et si pointilleux, avait nom M. Bouton de Chamilly, ce qui ne l’empêchait pas d’être assez bon gentilhomme, ainsi que l’avoue le Duc de Saint-Simon, lui-même !

Le tribunal eut la malice de recommander au père de la Duchesse de Berry de vouloir bien faire emprisonner l’amant de sa fille au fort de Ham, et ceci par lettre de cachet, afin de lui apprendre à se conformer aux édits qui proscrivent les duels ; et pour deus ans, portait la cédule, attendu qu’il avait accepté de se battre avec un roturier. La Duchesse de Berry lui fit avoir sa grâce au bout du semestre ; le commis avait été renvoyé libre comme un nuage, attendu qu’il n’était pas justiciable du Point-d’honneur, mais la Princesse du Chevalier d’Aydie le fit traquer, saisir, claquemurer, poursuivre par les gens du Parquet, et la méchante ne prit nul repos qu’elle ne l’eût fait pendre, ce qui s’effectua le 19 juin 1719, à l’horreur, au scandale et à l’abomination de tout Paris !

Cette Princesse ne survécut pas plus d’un mois à ce malheureux jeune homme, qui s’appelait effectivement M. Bouton, tout ainsi que le Maréchal de Chamilly. La sensible Émilie disait spirituellement que, s’ils ne faisaient pas la paire, ils n’en étaient pas moins sortis de la même fabrique. Elle était dénigrante et méprisante au point d’en impatienter, et je me souviens à cette occasion-ci, d’une petite exé-