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À MON PETIT-FILS

fait une mauvaise action, on ne manque jamais de se faire une mauvaise maxime. Aussitôt qu’un écolier a des amourettes, il ne veut plus dire ses prières, et quand une femme a des torts envers son mari, elle tâche de ne plus croire en Dieu. En Italie, en Espagne, on pèche autant qu’en France, et pour le moins, à ce qu’il m’a semblé ; mais on y sait ce qu’on fait, du moins ; et comme on y garde la foi, il y a toujours du remède ; les orages des passions bouleversent les cœurs, mais ils n’atteignent jamais les croyances ; les opérations du jugement n’en souffrent point ; l’expiation succède à l’erreur, et la moralité du reste de la vie n’en est pas détruite. Le feu des mêmes passions s’éteint bientôt dans le vide et le néant du cœur humain, qu’un amour infini, l’amour de Dieu, peut seul remplir et satisfaire, ainsi que vous l’éprouverez certainement. Pourvu qu’on n’ait pas le jugement faussé par une incrédulité systématique, on acquiert inévitablement l’expérience et le dégoût des affections passionnées, on se laisse attirer par l’action de Dieu : et dans ces autres pays où les passions ne s’attaquent pas aux croyances, on n’entend jamais parler ni d’un vieillard dissolu, ni d’une vieille femme irréligieuse, ce qui m’a toujours paru les deux choses du monde les plus odieu-