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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

beauté radieuse, et vous pourrez savoir de tous ceux qui l’ont connu qu’on n’a jamais pu le flatter dans ses portraits.

Cet enfant royal avait commencé par écouter paisiblement, si ce n’est attentivement, toutes les harangues et tous les discours d’apparat, toutes les prestations de serment et tout ce qui s’ensuivait ; mais on s’aperçut qu’il tournait toujours la tête et regardait continuellement du côté gauche, afin de considérer la figure du Cardinal de Noailles, et sans avoir aucunement jeté les yeux sur toute cette foule de Présidens et de Conseillers en robe rouge, qu’il ne connaissait pas plus que cet Archevêque de Paris. (Le Roi ne l’avait jamais vu, par suite de sa disgrâce à cause du formulaire.) Cependant le vieux Maréchal de Villeroy se mit à lui faire (au petit Roi) de petits signes avec sa grosse tête et ses gros yeux, pour qu’il eût à regarder soit d’un autre côté, soit en face de lui ; mais S. M. n’en tint compte, et finit par s’en impatienter. — Laissez-moi donc ! Laissez-moi ! Voilà les premières paroles que le Roi Louis XV ait proférées sur son lit de justice. Ce n’était pas seulement la petite personne du Roi qu’on y voyait ; c’était notre grande loi fondamentale et la haute maxime de l’hérédité monarchique !

Il est temps de sortir du palais de justice et de rentrer dans les salons de Paris. Écoutez le récit d’un événement incompréhensible.

La Comtesse de Saulx, Tavannes et Busançais, avait toujours passé pour un personnage étrange[1].

  1. Marie-Catherine d’Aguesseau, sœur du Chancelier de ce