de la brutalité de Luther et de la férocité de Calvin ; ils vont jusqu’à décerner les qualifications de vénérable docteur et d’homme vertueux à tous les chefs de la réforme, pendant qu’à la réserve de Mélancthon, peut-être, il n’en est pas un autre en qui l’on puisse entrevoir une apparence de vertu, ni un peu de bonne foi. Walpole m’a parlé d’un ouvrage philosophique où l’on n’a pas trouvé d’autre reproche à faire à Henri VIII, que celui de n’avoir pas toujours assez respecté les franchises de la pairie et les immunités de la chambre des communes.
Le motif qui peut dicter de pareils jugemens n’est pas difficile à surprendre, et voici quel en est toujours le régulateur. Un sujet, un homme privé, n’est jamais digne d’éloges à moins d’avoir été l’ennemi du christianisme ou du moins de l’autorité royale. Un souverain n’aura jamais eu de qualité louable s’il n’a pas été l’ennemi du christianisme ou tout au moins de l’autorité catholique. Au moyen d’un calcul systématique aussi facile à bien établir, on peut distribuer la louange ou le blâme, avec injustice, à la vérité, mais avec un discernement facile, au moins. Aussi l’on voit accabler de malédictions la Sanglante Marie, c’est-à-dire la sage et vertueuse Marie de Lancastre, pour avoir approuvé la condamnation de son persécuteur Cranmer, qui, du reste, était un fourbe, un sacrilège, un sujet rebelle, un archevêque apostat, tandis qu’on voit tolérer dans la protestante Élisabeth le martyre d’une Reine sa captive, sa parente et son héritière. En nous soutenant que le Roi Don Philippe a fait massacrer son fils, on nous assure qu’il est très-douteux que le Czar Pierre