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P. CORNEILLE


1606 — 1684



Le finie de Corneille a tout ctii en France.
VOLTAIRE.



En lisant les Œuvres diverses de P. Corneille, recueillies pour la première fois plus d’un demi-siècle après sa mort, on s’étonne qu’il n’ait pas été plus souvent cité parmi nos lyriques. Il excelle pourtant dans ces poésies diverses où le lyrisme tient une si grande place ; mais une partie de ses œuvres disparaît sous la gloire des autres ; il se fait tort à lui-même, et son génie de poète dramatique nous a fermé les yeux sur ses autres mérites. Tout le monde dira : Corneille, le premier de nos tragiques ; mais personne n’ajoutera : et l’un de nos meilleurs lyriques. Ce style unique de vigueur et de fierté, que depuis deux cents ans nous admirons au théâtre dans la bouche de Rodrigue ou du vieil Horace, nous sommes sourds à le reconnaître dans la bouche même du poëte. Celte grandeur, que nous applaudissions dans la fiction, semble, dans la réalité, nous devenir importune. Il est vrai que Corneille lui-même, n’ayant foi en son génie que pour le théâtre, a donné lieu, le premier, à cette injustice pour ses poésies volantes, à force de les déprécier. On l’a cru— sur parole, et pourquoi ? Parce que, même en se dépréciant, il restait admirable. De qui sommes nous dupes ici ? De son propre génie.

D’où lui venait cette prédilection exclusive pour ses œuvres dramatiques ? Peut-être de ce que sa grande âme ne se trouvait à l’aise que dans l’action, et que discourir seul à seul avec le lecteur, et même avec le roi, ne suffit plus à qui peut émouvoir tout un peuple. Corneille sentait en cela la supériorité de la poésie dramatique sur les autres