vent peut-être pas dans ceux de Catherine. Elle était mère, et le sentiment maternel est, quoi qu’on dise, bien plus fort comme inspiration que le sentiment filial. Elle avait aimé, et rien ne prouve, même sa poésie, que Catherine, qui mourut fille, ait jamais éprouvé d’amour. Madeleine d’ailleurs avait souffert, et Catherine, sans en avoir autrement le contre-coup, n’avait été que la consolation de cette souffrance. Or, l’inspiration est à celle qui souffre, non à celle qui console. Madeleine est donc bien plus une muse que Catherine : elle l’est par le cœur, sa fille ne l’est que par l’éducation. Dans l’épître qui se trouve en tête des œuvres, et qui est adressée par la mère à sa fille, Madeleine Des Roches exprime bien tout cet amour maternel, qui est son génie, et dont la reconnaissance qu’elle ressentit des bons soins de sa fille a pour ainsi dire doublé la force, a Nous sommes, lui dit-elle, semblables d’esprit et de visage, et l’on croit que de là vient notre attachement, mais non :
Ni pour nous voir tant semblables de corps,
Ni des esprits les gracieux accords,
Ni cette double aimable sympathie
Qui faict aymer la semblable partie,
N’ont point du tout causé l’entier effect
De mon amour, envers toy si parfaict ;
Ny les efforcts, mis en moi par nature,
Ny pour autant qu’es de ma nourriture ;
Mais le penser qu’entre tant de mal-heurs,
De maux, d’ennuis, de peines, de douleurs,
Subjections, tourments, travail, tristesse,
Quy puis treize ans ne m’ont pas donné cesse ;
Tu as, enfant, apporté un cœur fort
Pour résister au violent effort
Qui m’accabloit, et m’offrir dès l’enfance
Amour, conseil, support, obéissance.
Le Tout-Puissant, à qui j’eus mon recours,
A fait de toi naistre mon seul secours :
Or, je ne puis, de plus grands bénéfices
Recompenser tes louables offices
Que te prier de faire ton devoir
Envers la muse et le divin savoir.
Cette préoccupation du savoir et des Muses était la principale pensée de Madeleine des Roches. Elle n’ignorait pas que dans le monde jaloux on disait grand mal de ses désirs de science, de ses hautes visées poétiques, et qu’on la renvoyait au fil et aux aiguilles, comme fit Chry-