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POÉSIES D’EUSTACHE DESCHAMPS.
Ceulx qui n’aiment, et ceulx qui ont amé,
Ly refusant seront chétif clamé[1],
Et li donnant aront vermeille face,
Et si seront au monde renommé :
Viellesce est fin, et jeunesce est en grace.
envoi
Prince, chascun doit en son josne aé[2]
Prandre le temps qui lui est destiné ;
En l’aage viel tout le contraire face ;
Ainsis ara les deux temps en chierté[3].
Ne face nul de s’amour grant fierté[4] :
Viellesce est fin, et jeunesce est en grace.
CHANSON ROYALE[5]
Une brebis, une chièvre, un cheval,
Qui charruioient en une grant arée[6],
Et deux grans buefs qui tirent, en un val,
Pierre qu’on ot d’un hault mont descavée[7],
Une vache, sans let, moult décharnée.
Un povre asne qui ses crochès portoit,
S’encontrèrent[8]. L’asne aux bestes disoit :
- ↑ C’est-à-dire : celles qui n’auront répondu que par des refus auront un renom misérable, et celles qui auront été compatissantes feront une brillante figure et seront fameuses dans le monde (auprès de la postérité).
- ↑ Âge.
- ↑ C’est ainsi que les deux époques de la vie lui seront chères.
- ↑ Personne ne soit trop fier dans ses amours.
- ↑ Cette remarquable pièce est une satyre politique dont le sens est des plus transparents. Les puissants oppresseurs de la société féodale sont ces « barbiers » auxquels s’adressent les plaintes et les malédictions des interlocuteurs, véritables personnages d’apologue.
- ↑ Plaine, du latin area.
- ↑ Extraite en creusant.
- ↑ Pour : se rencontrèrent.